« Sherlock Holmes and the Vampires of Eternity », de Brian Stableford

Or donc, dans Sherlock Holmes and the Vampires of Eternity, de Brian Stableford, nous avons Sherlock Holmes, des vampires, l’éternité, mais aussi Oscar Wilde, William Hope Hogdson et du voyage dans le temps. Attendez, ne partez pas comme ça!

Oui, j’admets que, dit comme ça, le bazar évoque autant la choucroute impériale pour douze personnes qu’un triple album de Blind Guardian. Et, pour être franc avec vous, il y a un peu de cela aussi. Mais ce roman, recommandé par Gromovar, est plus que le pastiche éhonté qu’il paraît au premier regard.

Le point de départ de ce roman chroral, c’est l’élaboration, par le professeur Copplestone (un savant victorien dans toute sa splendeur), d’une drogue capable de faire voyager dans l’avenir. Voyage hallucinogène, qui n’est pas à la portée de tous les esprits et pas sans risque non plus pour la santé physique (et mentale) des voyageurs.

Le professeur va raconter ses voyages à une assemblée réduite où se retrouvent H.G. Wells, Nikola Tesla, Oscar Wilde et un célèbre détective conseil accompagné de son fidèle ami, qui est également le médecin du professeur, ainsi que le comte Lugard, aristocrate est-européen à la réputation sulfureuse.

Et, tour à tour, plusieurs de ses spectateurs vont tenter l’expérience, jusqu’à former une société secrète qui, une génération plus tard, arrache aux tranchées d’Ypres le lieutenant Hodgson. Lui aussi fera le voyage, plusieurs millions d’année dans l’avenir. Car l’enjeu est de taille: il s’agit, ni plus ni moins, de sauver l’humanité de son extinction programmée.

Peut-être.

Sherlock Holmes and the Vampires of Eternity – compilation remaniée de plusieurs textes de Stableford, parue en français sous le titre La Porte de l’éternité – nous parle surtout de témoignages de personnes à l’imagination fertile qui pensent avoir voyagé dans l’avenir.

Certes, leurs témoignages concordent et certains éléments laissent à penser que c’est effectivement le cas, mais comment en être sûr? Comment ne pas penser que c’est une sorte d’hallucination collective? La réponse, est « on ne peut pas ».

Sauf dans le cas d’Hodgson, le seul à ne pas avoir assisté à la première séance – séance qui, par ailleurs, rappelle les narrations de Carnacki. À part, bien sûr, si c’est lui qui a tout inventé.

Cette interrogation est un des éléments-clés du roman. Mais ce n’est pas le seul atout de Sherlock Holmes and the Vampires of Eternity. C’est aussi un texte qui nous met en face de notre propre disparition probable – à plus ou moins long terme.

Le fait qu’il mette en face de cette menace des personnages de la Grande-Bretagne victorienne n’est pas un hasard. Le fait qu’un certain nombre des protagonistes sont eux-mêmes face à leur prochaine disparition n’est pas non plus fortuit.

C’est aussi un vrai roman de science-fiction contemporain (même si certaines parties ont maintenant plus de trente ans), avec des concepts étonnamment modernes. On trouve ainsi du transhumanisme, des nanomachines, de la terraformation, le concept de transformer la matière en ordinateur géant, etc.

Brian Stableford présente d’ailleurs ces concepts à la « sauce » de la fin du XIXe siècle. Le ton du roman est principalement à la première personne, presque épistolaire. Les protagonistes témoignent de leurs expériences, de leurs doutes.

Le name-dropping est assez impressionnant: outre les précités, on croise également Camille Flammarion, Alfred Jarry. Ironiquement, le seul qui n’est pas nommé dans le texte est le grand détective du titre – et son fidèle ami et biographe.

Sherlock Holmes and the Vampires of Eternity est un roman impressionnant. C’est aussi un texte remarquablement dense – trois cents cinquante pages bien remplies, en format moyen – et une œuvre érudite. L’avant-propos de l’auteur (dans l’édition anglaise) donne le ton, avec la liste de ses sources.

Malgré tout, il se lit vite. Il y a somme toute peu d’action et la langue parfois très datée (c’est le côté pastiche qui veut ça, j’imagine), mais le propos est réellement captivant. J’avoue cependant avoir sauté quelques paragraphes, notamment dans les dialogues sur le sens de la vie et de l’univers. J’étais pressé de finir.

Cela dit, le point le plus négatif de Sherlock Holmes and the Vampires of Eternity est sans doute sa couverture. Pour le reste, c’est un roman qui devrait fasciner les amateurs de science-fiction, de concepts de haut niveau, de voyage dans le temps et de la fin du XIXe siècle.

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3 réflexions au sujet de “« Sherlock Holmes and the Vampires of Eternity », de Brian Stableford”

  1. Et pourquoi pas des cross-over, justement. On pourrait même imaginer qu’Armand, Lestat rencontrent notre ami détective qui lui même ferait la chasse à un certain Dr Jekyll (oui c’est ma période…). Il serait aidé par
    Van Helsing évidemment…

    Le cinéma a largement fait ce genre de choses de toute façon.

    Répondre
    • Ce roman-ci est beaucoup plus malin que ça.

      Cela dit, des crossovers de ce genre, dans le monde des fanfics, ça existe déjà depuis un bon moment.

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