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Santé mentale

Réorientation, déménagement, séparation… Comment la pandémie a bouleversé vos vies

Trois confinements, des couvre-feux et des restrictions sanitaires : les bouleversements amenés par la pandémie n’ont pas manqué de se répercuter sur vos vies. Cinq lectrices nous ont raconté ce qui avait changé pour elles.

Cette pandémie qui s’éternise a changé bien des choses dans nos quotidiens : elle a précarisé l’équilibre professionnel et financier de nombre d’entre nous, a porté avec elle un lot d’inquiétudes et d’incertitudes quant à l’avenir, a transformé nos relations affectives…

La brutalité de ces bouleversements a aussi été vecteur de changements individuels. Des changements imposés aux décisions radicales, nos manières de nous comporter et d’habiter le monde ont été forcées d’évoluer avec notre environnement. Nous vous avons posé la question : qu’est-ce qui a changé, pour vous, depuis la pandémie ? Cinq lectrices racontent leurs introspections et leurs conséquences.

Des changements d’orientation

De toute les populations fragilisées par la crise sanitaire, les étudiants et étudiantes sont parmi les plus touchées par les pertes d’emploi et l’isolement.

Nombre d’entre elles et eux ont aussi connu une période de décrochage, qui a parfois amené à des changements d’orientation. Comme Enzo, 19 ans, qui raconte :

« C’était une année assez catastrophique. Notre emploi du temps était instable, et nous passions du présentiel au distanciel à cause du virus.

Les gens s’imaginent que les cours à distance sont faciles. Mais l’indifférence de nos profs et les distractions à proximité nous ont plutôt poussé à décrocher, mes amies et moi… »

Il explique qu’à la fin de cette année, il a choisi de se réorienter dans une filière qui lui plaisait plus, et où il n’avait pas été accepté après son bac. Et il a été pris ! Un bon moyen pour lui de retrouver de la motivation, dans une situation peu propice aux études.

Ces changements dans les envies d’orientation ont aussi été ressentis par Iris, 15 ans. Elle qui termine tout juste sa seconde a réalisé au fil des confinements que ses projets d’avenir n’étaient pas en phase avec ses envies. Elle explique :

« Pendant le confinement, il n’y avait plus personne pour me juger : on n’avait plus de vie sociale, personne ne me disait quoi faire de mon avenir puisqu’il était tout d’un coup devenu incertain. Ça m’a permis une grosse remise en question. Sur qui j’étais, ce que je voulais vraiment et pourquoi…

Je pensais que je voulais devenir architecte, et qu’il fallait que je m’oriente en fonction. Mais je réalise que ce genre de job n’est pas fait pour moi du tout !

Pour commencer, j’ai décidé de prendre une année de césure pour voyager après mon bac, parce que le monde est grand et qu’il y a beaucoup de choses à y voir. Ensuite, j’aimerais faire un métier où l’on rencontre des gens différents, tout le temps, et où l’on peut partager et apprendre les uns des autres… Mais j’ai encore un peu de temps pour décider ! »

« J’ai arrêté de cacher mon handicap invisible »

Iris n’est pas la seule a avoir expérimenté cette introspection pandémique, qui a amené tant de personnes à changer de mode de vie. Dans le cas de Laelia, celle-ci s’est soldée par un changement d’organisation de sa vie. Elle explique :

« Dans la vie d’avant, comme on l’appelle parfois, ma vie était bien remplie et organisée : le travail, mes amis, mes passions. En gros, je suis la personne qui vit à Paris et qui court les musées, les cinémas et les théâtres très intensément. Mais ça, c’est le sommet de l’iceberg.

Ma vraie vie est organisée par mon handicap invisible, qui va de la douleur jusqu’à la perte de motricité et sensorialité totale de membres, surtout la jambe. »

Laelia* raconte que depuis l’adolescence, elle avait pour habitude de cacher son handicap, notamment par peur du rejet.

Je n’en parlais qu’à un minuscule groupe d’amis. La « moi au complet », je ne l’assumais pas en public.

« J’étais retenue par une forme de pudeur, et une peur du rejet. Les pensées biens négatives du type « Mais si j’en parle on ne voudra pas de moi », « Non mais je le cache, ça ne se voit pas donc on ne comprendra pas », « Je ne vais pas déranger avec mes problèmes de santé », je ne les connaissais que trop bien… »

S’assumer pleinement, et s’engager

À la fin du premier confinement, quand elle retrouve ses collègues sur son lieu de travail, elle prend conscience que la crise sanitaire a fait connaître au monde une situation qu’elle connaissait déjà très bien.

« J’ai réalisé que tout le monde s’était mis à vivre ce que je connaissais depuis bien trop d’années ! À savoir, être coincée chez soi sans pouvoir sortir, privée de tout, inquiète pour sa santé, et avec un grand besoin d’être rassurée.

Et là, ça a été le grand moment. Je me suis dit : « Stop. J’arrête de me cacher. Je partage mon expérience. Je n’ai pas à avoir honte. »

Il est temps pour moi de crier haut et fort que le handicap invisible existe. Et qu’il est grand temps que ce monde « d’après » soit partagé entre les valides et les handis ! »

Cela sonne comme une phrase étrange aux yeux de Laelia*, mais elle l’affirme tout de même : c’est « grâce » à cette pandémie qu’elle a décidé d’assumer son handicap invisible et de s’accepter pleinement. D’ailleurs, elle compte bien s’engager à sa façon dans le monde d’après, et elle sortira en septembre son propre site sur le handicap invisible.

« Avec tout ce cheminement depuis le premier confinement, je me sens prête à m’ouvrir au monde et dire haut et fort : « Oui, j’ai un handi invisible, je ne vais plus me cacher, il est temps de nous voir et de nous voir, nous comprendre et nous inclure dans la société ! »

Quitter son conjoint, et vivre pour soi

Pour Adèle*, 39 ans, les confinements successifs et autres restrictions sociales ont mené à un trop plein de pensées qui ont changé sa manière même de communiquer : elle a décidé de s’affirmer. Elle raconte :

« Avant le Covid, j’étais en couple depuis huit ans, depuis deux ans dans des démarches de PMA, et en train de visiter des maisons pour en acheter une. Mais après une troisième tentative de FIV ratée, j’ai réalisé que je portais les démarches seule.

Avec le confinement, mon cerveau tournait en rond : il n’était plus possible de prendre du recul, de sortir de chez soi, de voir des gens… Sans soupape de décompression, je me suis retrouvée à dire les choses beaucoup plus clairement à mon partenaire. »

Elle explique que jusqu’ici, elle avait tendance à se soumettre aux décisions de son compagnon par peur de la séparation. Mais cette fois-ci, Adèle n’a pas temporisé sa pensée, et a réussi à affirmer ce qu’elle ressentait : qu’elle voulait cesser ce parcours de PMA, ce qui a mené à la rupture avec son conjoint.

« Quand j’ai réussi à affirmer mes ressentis auprès de lui sans avoir peur des conséquences, j’ai réalisé que je pouvais appliquer cela à tout : ma vie professionnelle, ma vie de famille… Je peux dire ce que je veux, et les choses se passent bien ! Je me sens enfin moi, sans avoir à me sentir obligée de me plier aux exigences d’une tierce personne, par crainte d’être rejetée, ou quittée. 

Aujourd’hui, je suis célibataire, j’ai changé d’emploi, je vis seule, mais surtout je vis pour moi ! »

X

Déménager, et s’éloigner de la ville

Avant d’avoir eu à prononcer le mot Covid pour la première fois, Paule* vivait à Lyon et était employée en CDD dans une entreprise. Dans l’espoir de transformer ce contrat en CDI et de pouvoir faciliter sa vie administrative et celle de son compagnon, elle donnait énormément d’énergie à son travail. Mais la crise sanitaire a eu raison des promesses de ses employeurs :

 

« Au mois d’avril, on m’a annoncé sur Zoom et devant toute la boîte que mon CDD ne serait pas renouvelé et que l’entreprise gelait les embauches. Gros coup de massue pour moi et mes projets… »

C’est à ce moment que son conjoint commence à lui parler d’acheter une maison à la campagne, et de quitter la ville. Mais Paule* ne se sent pas prête :

« J’ai toujours dix projets sur le feu et j’adore l’effervescence des grandes villes : le fait de toujours pouvoir aller voir une expo, un concert, sortir, voir ses amis facilement, aller au resto, faire du sport… 

J’ai découvert cette ambiance après mon bac à 17 ans et j’étais persuadée de ne jamais vouloir la quitter. »

Ayant grandi à la campagne, la jeune femme ajoute qu’elle y a associé des stéréotypes négatifs qui la bloquent :

« Beaucoup de peurs me retenaient. J’ai grandi en campagne, et je n’ai pas tellement de bons souvenirs de mon enfance et de mon adolescence là-bas. 

Y revenir, ça me paraissait être une sorte de régression. J’avais peur de l’isolement, de perdre ma vie sociale, de manquer des opportunités. J’ai aussi peur des ragots, du manque d’anonymat, que mes enfants se fassent harceler à l’école parce qu’ils côtoient des gens à l’esprit un peu trop étriqué, peur aussi d’être jugés parce qu’on ne fait pas des métiers classiques… »

Pendant l’été, ils rendent visite à des amis dans leurs grandes maisons hors des villes, et les choses se débloquent lentement pour Paule* : l’idée de vivre à l’air pur, de pouvoir fonder une famille loin d’un centre-ville fait son chemin pour elle. Elle explique : « Je me suis surprise à rêver d’une maison, d’un grand jardin, de mon mec à mes côtés et d’un enfant dans mes bras… »

Les mois passent, et son conjoint et elle décident de se mettre à chercher des maisons à la campagne, autour de Lyon. Après trois confinements, leur 30m2 en ville ne leur suffit plus. Et puis, Paule* l’explique, le ralentissement des activités engendré par la crise sanitaire les a forcés à ralentir, à envisager l’avenir d’une autre manière.

« Au mois de novembre, j’étais hyper triste : j’avais peur de l’isolement et du manque de vie sociale à la campagne, mais j’étais en ville et je le vivais aussi. Tous les matins, quand je descendais de chez moi, la ville était déprimante et morte.

Je me disais « ça ne sert à rien de vivre en ville comme ça ». À la campagne, on pourrait adopter un chat, avoir un potager et un poulailler, élever des enfants en plein air… Et puis, on pourrait vivre de manière plus éco-responsable ! »

Alors, en avril 2021, Paule* et son conjoint ont décidé de faire une offre pour acheter une maison dans la campagne, au sud de Lyon. Ils ont même signé le compromis de vente ! Et à présent, Paule est sûre d’elle : après dix ans en ville, cette pandémie lui aura fait réaliser qu‘il est temps pour elle de se mettre au vert.

Dans vos témoignages, vous êtes nombreuses à parler aussi des changements dans votre vie affective, qui s’est transformée depuis les restrictions sanitaires. Vous expérimentez un nouveau rapport au temps qui passe, et mentionnez à plusieurs reprises ne plus rien prendre pour acquis, y compris les moments les plus simples avec votre entourage… notamment par anxiété de tout voir se refermer à nouveau.

Mais quelles que soient les choses que nous réservent encore cette interminable pandémie, une chose est sûre : il nous restera toujours ces changements positifs auxquels se raccrocher !

À lire aussi : 5 lectrices racontent leurs dates en temps de Covid

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