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Travail

L’open space en été, cet enfer sur terre

Chloé, notre chroniqueuse préférée, vous dépeint avec humour un nouveau tableau savoureux : celui du boulot dans l’open space, pendant cette longue période qu’est l’été.

Dans la vie, il y a ceux qui partent faire le tour du monde en catamaran, sponsorisés par des entreprises passées maîtresses dans l’art du green washing, et puis il y a les autres, ceux qui arrivent de justesse à vendre un rein sur le Darknet pour s’offrir cinq jours de vacances dans un bungalow en Charente-Maritime. 

Je ne pense pas avoir besoin de préciser dans quelle catégorie je me situe, et si tu me cherches cet été, tu me trouveras derrière mon bureau, affalée sur un siège ergonomique payé une fortune par le département des ressources humaines et que je n’ai jamais réussi à régler correctement. 


Sur le plateau, c’est l’enfer et mes camarades d’open space profitent de l’été pour faire de ce lieu déjà peu recommandable habituellement une zone de non-droit absolu opposant les zélés de toujours à ceux qui se barrent dans une semaine et qui n’ont même plus l’intention de faire semblant. 


Et entre les deux, moi, qui ne vais nulle part, qui essaie de survivre et qui souhaite témoigner pour que les hommes n’oublient jamais, même une fois que la fraîcheur du mois de septembre aura permis au monde du travail de recouvrer sons sens commun.

L’open-space en été, des conditions météorologiques extrêmes

Polaire, tropical ou aride, l’open space possède toujours son propre microclimat et, selon les amas de plasma laiteux qui valsent dans les bouches d’aération, son propre écosystème. Si certains bureaux pourraient faire office de simulateurs miniatures pour expliquer simplement l’effet de serre aux climatosceptiques et aux petits enfants, la véritable plaie de l’open space en été, c’est avant tout l’air conditionné, et son souffle vicié qui consanguine à l’infini dans des conduits poussiéreux avant de nous jaillir au visage dans une apothéose de germes et d’acariens.

Au début de ma carrière professionnelle de personne survivant bon gré mal gré dans des open-spaces, je pensais naïvement que s’il faisait trop chaud, il suffisait d’ouvrir la fenêtre et si à un moment le frais du dehors rendait le chaud du dedans trop frais, il suffisait de refermer la fenêtre. 

Je pratiquais cette méthode chez moi et c’était assez efficace quoi que plutôt non-orthodoxe, donc je m’excuse d’avance si je vous ai collé de drôles d’idées dans la tête, comme je me suis excusée auprès de ma manager quand elle m’a expliqué que certains de mes collègues s’étaient plaints de mes excentricités malaisantes alors que le bureau était pourvu d’un climatiseur qui fonctionnait parfaitement.

La preuve, il faisait 7 degrés à l’intérieur, contre 35 dehors.

Finalement, les choses sont plutôt bien fichues. Je n’ai plus besoin d’aller me baigner dans une eau glacée pour risquer le choc thermique et surprendre sur moi le regard torve de Roger Boomer émoustillé par toutes ces couches de vêtements que j’enlève, puis remets au gré des humeurs de notre système de ventilation cyclothymique. 

L’open space en été : ceux qui font semblant de travailler

La motivation, c’est un peu comme les variants du COVID, ça s’en va et ça revient et l’été ça s’en va même souvent très loin, alors que moi, je reste à La Garenne-Colombes dans le 92. 

Et quand je hume l’atmosphère de débandade qui flotte dans le bâtiment, je réalise que je ne suis pas la seule à avoir déposé ma motivation à l’aéroport au début du mois.

En juillet et en août, tout le monde sait qu’il ne se passe rien ! 

Ce théorème, quoi que mondialement connu, reste finalement assez difficile à démontrer puisque chaque salarié français bénéficie en moyenne de 5 semaines de congés payés par an, que la grande majorité n’en pose pas plus de deux ou trois en été et que je suis assez certaine que juillet et août cumulé ça ne dure pas trois semaines. 

Et même en l’admettant, mon management a prévu le coup en interdisant plus d’un départ à la fois au sein de notre équipe de dix.

Délestée de cette interrogation existentielle, reste tout de même ma charge de travail minimale. Il est regrettable que minimal ne soit pas le mot qui définisse le mieux mon superviseur, ni le collègue zélé qui passe régulièrement derrière mon écran pour me régaler d’un « Bah dis donc ça bosse dur ! » et qu’un jour, je vais traquer comme une bête jusque dans les toilettes pour hommes pour l’éviscérer avant de me gargariser de son sang. 

Me voilà donc obligée de faire semblant de travailler. Cette tâche bien plus ardue qu’il n’y parait m’impose d’avoir en permanence des projets factices ouverts à l’écran. Régulièrement, j’effectue des petits clics aléatoires à droite à gauche, puisque certaines entreprises n’ont honte de rien et n’hésitent pas à installer des trackers sur les postes de travail de leurs employés pour contrôler leur productivité.

La plaie de l’open-space : les gens qui partent en vacances

La seule chose que je reproche vraiment aux vacances, c’est quand elles se déroulent sans moi et que je suis consignée à l’open-space et condamnée à écouter des collègues couleur langouste me narrer pour la troisième fois consécutive cet irrésistible déjeuner où ils ont retrouvé un bébé souriceau encore vivant dans la choucroute surgelée d’un petit restaurant basque tellement pittoresque. 

Il y en a toujours un plus sournois que les autres pour me demander d’un ton faussement aimable si moi aussi je pars, alors qu’il suffirait d’aviser mon air grincheux pour obtenir la réponse à cette question. 

Pédagogue, j’explique que non, puisque malheureusement, le désert d’Atamaca fait office d’Oasis tropicale comparée à mon compte en banque.

« – Tu vas quand même pouvoir te faire des petits week-ends à droite à gauche ? »

S’enquiert l’opportun pour dissiper l’épais malaise qui se répand immédiatement parmi mes collègues. Heureusement que la théorie du petit week-end – étymologiquement inexacte puisqu’un week-end se compose de deux jours, ni plus ni moins – est là pour sauver la mise et ôter la culpabilité gênante qui ronge mes compagnons d’open-space confrontés à ma peau grisâtre seulement irradiée par le rayonnement sale des néons.

Tout le monde retient son souffle. Par égard au contrat social estival tacite, je hoche positivement la tête et je peux percevoir un soupir de soulagement se diffuser chez mes pairs.

La perspective de visiter une petite ville pavillonnaire de banlieue parisienne et de dormir dans un Airbnb hors de prix me permet in extremis de singer un amour de l’aventure estivale qui rassure tout le monde et m’assure, temporairement du moins, de conserver des alliées lors de mes virées à la cantine.

À lire aussi : Vous faire rire en parlant du dernier rapport du GIEC sur le climat, c’est possible sisi

Crédit photo image de Une : série The Office


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